Son-et-lumiere

When I was a boy with never a crack in my heart.

Mardi 14 septembre 2010 à 0:16

Il est des choses que l'on ne peux exprimer. Que la langue nous empêche d'exprimer sans véritable talent ( j'en parlais avec Monochrome.dream ici). Ces choses peuvent être de l'imagination : "J'imagine un monde, en 6 dimensions, je l'imagine très bien dans ma tête, mais je ne sais pas l'exprimer", on se trouve tous confrontés au problème un jour ou l'autre... (De nombreuses discussions avec Nezu à ce sujet...) On pourrait même aller jusque dire que les mots sont une barrière à l'imagination, que l'on imagine réellement quelque chose avec précision que si l'on sait le nommer. Que le concept ou l'objet matériel n'existent que parce que des noms, adjectifs, s'y rapporte. Ceci mériterait de nombreux articles, écrits par un philosophe bien plus talentueux que je ne le suis.
Il est des choses que l'on ne peux exprimer. Car elle n'en sont pas, des choses, plus clairement. Changez le terme alors,si il ne vous plait pas, mais rien ne change, si ce n'est le mot employé.

Mais là n'est pas l'idée de l'article. Il y a surtout des sensations que l'on ne peux pas exprimer. Et pire, il y a des sensations que l'on ne veux pas exprimer. Certaines choses sont trop fortes, prêtes à vous détruire, presque. Il est des ondes lumineuses, sonores, des molécules sur la langue, dans le nez, des villosités sous les doigts qui ont un effet sur l'organisme. Peu poétique ce que je dit, mais c'est bien ce dont il s'agit. Un ensemble d'information traitées, des milliards de neurones, des molécules, des charges se déplacent, sans passage par le moindre "centre de décision", sans demander l'avis de la "volonté". Et me voilà transporté. Transporté nul part bien sur, je ne me déplace pas. Mais la chimie fait son oeuvre et mon coeur accélère, ralentit, ma digestion même s'en voit modifiée. Je ressent mon corps différemment. Je sent une essence dans la cause de ce capharnaüm. Je la ressent plutôt. Pas de sens stimulés, seulement l'effet du message sur le cerveau qui matérialise alors je ne sais pas. Seule, ma tête imagine. Seul, mon corps subit des changement. Je perçois le fruit de cette imagination qui n'est pas mienne. Je sent mon corps changer. Mais ne contrôle pas. J'ai bien quitté mon corps. Transporté.

Il est alors aisément imaginable qu'une telle intimité trouvée dans la réception de ces message nerveux n'est pas sans entrainer une certaine timidité. Une pudeur de me montrer non pas nu, mais "dématérialisé", à vif. 
Et puis il y a la crainte de la déception. "C'est bizarre" ; "Bof, tout ça pour ça ?" ; "C'est sympa oui". Et alors j'aurai la sensation de vous avoir fait rater le truc, cette essence. Que je vous ai conditionné pour résister à l'emprise du message. Car évidemment, je le sait bien, chacun ses goûts, mais mon corps, hors contrôle, m'affirme que c'est universel.

Pour aller plus loin, je conseille la lecture du beau commentaire constructif de monochrome.dream ci dessous.


Commentaires

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Par lafolle le Mardi 14 septembre 2010 à 2:30
j'Adore!
Par monochrome.dream le Mardi 14 septembre 2010 à 13:31
Les thèmes de l'imaginaire et de l'écriture me travaillent beaucoup, en ce moment. Celui de l'intimité dans l'écriture, aussi.
Il y a un exemple que je trouve un peu mal choisi (tu m'excuseras, c'est une critique de rien du tout, un peu du genre « bonjour je suis perfectionniste et le bibelot n'est pas droit sur le meuble »), donc un exemple que je trouve un peu mal choisi dans le tout début de ton article : l'espace à n dimensions, on ne l'imagine pas, justement. Tout ce que l'on pourrait tenter pour se représenter cet espace tombe à l'eau. On a pourtant bien saisi le concept de « dimension » et celui d' « espace », et l'on arrive même à les faire fonctionner ensemble mais de façon abstraite, alors, toute théorique. Comme si je te parlais d'un carré rond. Quelque chose que le langage permet de concevoir malgré les plus absurdes des contradictions, mais sur quoi bute irrémédiablement l'imagination.
Enfin c'est un détail et de toute façon, ça n'obscurcit pas vraiment ce que tu veux dire. Je trouve ton article extrêmement clair.
Et pour en venir à ce qui te préoccupe, je pense comprendre de quoi il s'agit (je peux aussi avoir tout interprété de traviole, hein!). Cela m'arrive aussi, pas forcément avec des sensations pour points de départ, mais plutôt avec des mots précis (pas ceux que l'on pourrait croire), qui réveillent en moi des choses bien plus fortes que ce dont on pourrait s'attendre de la part de ces mots. Il y a des mots que je ne prononce ni n'écris jamais, et pire, qui venant des autres, me gênent pour eux, me font rougir par empathie ! D'un coup, le mot devient plus que la chose, il se révèle comme prenant racine dans une intériorité bien plus profonde que ce que l'on aurait pu croire en assignant d'abord le mot au simple effort de l'imagination dans ses tentatives langagières pour circonscrire le réel. Je retourne un petit peu ce que tu dis, ici, c'est vrai : tu parles d'une imagination qui déborde la parole, et je te réponds comme si tu avais simplement subordonné la parole à l'imagination. La conclusion demeure la même : la parole, dans les deux cas, ne semble pas à la hauteur. Et lorsqu'elle pourrait l'être, c'est de façon si simple, au travers de mots si basiques, que l'on n'y croit pas. Est-ce que les autres s'apercevront seulement de l'effort que nous coûte ce petit mot qui en dit tant ? Est-ce qu'ils seront sensibles à tout ce que ce mot peut comporter d'intime, d'impudique, de violent, même ? Mes mots interdits ne semblent faire frémir personne d'autre que moi. Et d'une certaine façon, cela m'arrange. Au moins, si je suis amenée à les dire, quel que soit l'emballement chimique qu'ils provoquent en moi, cela restera mon secret et tout au plus je rosirai. Toutefois personne n'ira soupçonner au combien ce mot ME concerne. A ce moment là, il apparaît que ce que l'on souhaite cacher relève plutôt de ce que la sensation peut avoir de très personnel. On aimerait pouvoir l'exprimer tout en se mettant hors de cause, et cela tu le dis très bien dans ta dernière phrase, lorsque tu évoques la déception des autres. Parvenir à toucher chacun est un véritable défi. Les poètes et auteurs de talent s'en tirent bien dans ce domaine, en général, ils ont ce quelque chose, peut-être une conscience suraigue de la dimension désespérément universelle des mots, qui leur permet de ressentir quand l'harmonie entre la sensation et son expression est à son comble. Enfin, je ne sais pas, je suppose. Des gens comme Hegel ou Bergson, par exemple, ont parlé (et ça me fascine) de cette universalité liée au langage. Il y aurait beaucoup à cogiter là-dessus, avec le risque évident de s'écarter de ton sujet de départ, donc laissons ça de côté.
Pour en revenir à nos moutons, j'ai pu me rendre compte que ces sensations, ces vibrations du corps que l'on espère masquer par pudeur ou timidité, ressurgissent malgré tout à l'improviste dans des paroles que l'on ose, cette fois, prononcer sans scrupule, ou dans d'autres que l'on ose écrire. Comme si tout ce que je remballais en moi en bouchant bien la sortie avec mes deux mains, s'échappait par des failles collatérales jusqu'alors insoupçonnées. C'est alors dans les réponses même que l'on me fait que je me retrouve nez à nez avec ce que je pensais avoir si bien dissimulé de moi. Drôle d'impression, souvent.
Il était un peu long, ce com... mais ton article me parle tellement !, il vise tellement au coeur de ces sujets qui me passionnent, que je n'ai pas pu m'empêcher de blablater un peu.
Par monochrome.dream le Mardi 14 septembre 2010 à 13:38
(Je me rends compte, à la relecture, que je suis passée sans transition de la sensation à l'imagination, sans avoir ne serait-ce que discuté l'amalgame, ni l'avoir rapporté au langage. Mais je crois que si l'on espère être parfaitement rigoureux dans des commentaires plutôt spontanés, on a autant abandonner les blogs et se consacrer à la rédaction d'un traité :p Yu verras bien où à lieu la brisure dans mon com', je ne m'en fais pas pour ça.)
Par Musi le Mardi 14 septembre 2010 à 14:09
Tu es pardonnée sans problème, j'ai même personnellement presque abandonné l'idée de relecture des commentaires ou des articles "engagés", car il me faudrait des heures pour arriver, après avoir tout supprimé 5fois, a quelque chose quine me déçoive pas trop..
Par lancien le Mercredi 22 septembre 2010 à 18:28
L'homme est effectivement quelque chose de mystérieux, l'union d'un corps et d'un esprit comme disait Pascal. Mais la petite connaissance du cerveau qu'on commence à avoir de nos jours permet d'expliquer une partie de ce que tu exprimes si bien et qui heureusement est particulier à chacun de nous, mais qu'il n'est malheureusement pas facile de partager avec un autre.
Je suis venu sur ton blog à la suite d'un de tes commentaires. Il y a de belles photos. Mais je susi resté sur ma faim car je voulais savoir quelque chose d'indiscret : si tu étais en prépa et de quoi, car tu as défendu que travailler 15h par jour était grisant et le nombre de jeunes qui pensent cela est très réduit beaucoup plus réduit qu'autrefois. Alors cela m'a étonné et j'ai voulu te connaître.
Par goedkope voetbalshirts le Mercredi 31 août 2016 à 11:16
Mais il savait que nous saurions, le bougre !
 

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