Son-et-lumiere

When I was a boy with never a crack in my heart.

Vendredi 3 décembre 2010 à 21:29

Une aube pâle emplit le ciel triste ; le Rêve, 
Comme un grand voile d'or, de la terre se lève.

Avec l'âme des roses d'hier, 
Lentement montent dans les airs 
Comme des ailes étendues, 
Comme des pieds nus et très doux, 
Qui se séparent de la terre, 
Dans le grand silence à genoux.

L'âme chantante d'Ève expire, 
Elle s'éteint dans la clarté ; 
Elle retourne en un sourire 
A l'univers qu'elle a chanté.

Elle redevient l'âme obscure 
Qui rêve, la voix qui murmure, 
Le frisson des choses, le souffle flottant 
Sur les eaux et sur les plaines, 
Parmi les roses, et dans l'haleine 
Divine du printemps.

En de vagues accords où se mêlent 
Des battements d'ailes, 
Des sons d'étoiles, 
Des chutes de fleurs, 
En l'universelle rumeur 
Elle se fond, doucement, et s'achève, 
La chanson d'Ève.

Charles VAN LERBERGHE   (1861-1907)


(Je ne propose surtout pas de musique, ce serait une offense à van Lerberghe que ne pas laisser ses mots chanter d'eux même.)

Samedi 13 novembre 2010 à 18:50

 L’horloge
 
L’horloge de chêne tricote
avec ses aiguilles de fer
un invisible pull-over
et le temps lui sert de pelote.
 
Maille à l’endroit, maille à l’envers,
le temps lui file entre les doigts,
fil de neige pour les jours froids
et fil d’herbe pour les jours verts.
 
Une heure noire, une heure blanche,
crochetées et croisées sans trêve,
l’écheveau des nuits et des rêves
se dévide au bout de ses branches.
 
Qui portera ce vêtement
qu’elle tisse avec tant d’adresse
sa laine douce est la caresse
de quel hiver, de quel printemps ?
 
Elle tisse car le temps presse,
maille blanche sur maille noire,
en ignorant que la mémoire
défera les fils qu’elle tresse.
 
Elle a beau nouer et lier
le fil qui se perd et se casse,
nul n’a pu s’habiller
de la laine du temps qui passe.

Charles Dobzynski

Dimanche 17 octobre 2010 à 21:26




I bring you with reverent hands 

The books of my numberless dreams, 

White woman that passion has worn 

As the tide wears the dove-grey sands, 

And with heart more old than the horn 

That is brimmed from the pale fire of time: 

White woman with numberless dreams, 

I bring you my passionate rhyme.


William Butler Yeats - A Poet to his Beloved.


Pour ceux qui sont vraiment intéressés : 
Worn = usé (dans le contexte)
Tide = marrée 
Dove-grey = Gris tourterelle (j'ai appris grâce a ce poème l'existence de cette couleur....)
Horn = Corne, mais aussi le cor (l'instrument)
To brim = Déborder

J'adore ce poème, et ai l'impression d'en comprendre l'essence, mais suis trop limité en français pour tenter la moindre traduction... Si quelqu'un est tenté de me proposer sa traduction je suis intéressé !
 
 

Jeudi 16 septembre 2010 à 19:26

"C'est une petite île, une île bleue, entourée de sable blond et couverte seulement
de quelques palmiers. Cet ile, son ciel, sa lumière, sa minuscule solitude protégée
par une mer chaude expriment le désir, la douleur d'un coeur blessé. Le desin naïf,
d'une manière frustre, toute pénétrée de rêve, me fait sentir avec force le silence,
l'exil terrifié, la scandaleuse espérance dont il est né."
                         L'enfant Bleu


 
 
Merci à pelote, versager, et alesia qui m'ont fait acheter ce livre !

Je me permet une expression de joie :

Jeudi 26 août 2010 à 10:45

J'aime pas les articles sur les bouquin.
Mais je me sent obligé. Toutefois, je ne serais pas long.

http://static.letsbuyit.com/filer/images/fr/products/original/79/48/au-coeur-des-tnbres-7948475.jpeg
Au coeur des ténèbres de Joseph Conrad, l'histoire d'un jeune marin plein d'ambition qui remonte un fleuve en Afrique noire, entrant dans un monde sauvage, et descendant vers les enfers.

Une nouvelle de 130pages que je n'ai pas lu si vite, tant les questions d'esclavage, de colonialisme m'affectent, et tant le livre est dur...
Pour ceux qui aiment les ambiances presque étouffantes,
Se sentir mal a l'aise en lisant,
Frissonner quand apparait "l'horreur !"
Et passer ensuite de nombreuses heures à y penser.

Il est rare qu'un livre m'affecte autant. Il est comme ce que j'appelle les "bons films d'horreur", sans vraiment de scène terrible, c'est l'essence du bouquin qui fait froid dans le dos, la succession des les lettres, phonèmes, syllabes, mots, phrases qui traduit la descente aux enfers de Marlow.

Une critique : le début est un peu long, avant de partir vraiment...


Dimanche 20 juin 2010 à 14:46

 Et je pèse mes mots, ce poème est un monument de la littérature française

Photo : Robert Doisneau.

http://son-et-lumiere.cowblog.fr/images/Doisneau3.jpg


V

 

LASSITUDE

 


                         A batallas de amor campo de pluma.
                                                           (Góngora.)

De la douceur, de la douceur, de la douceur !
Calme un peu ces transports fébriles, ma charmante.
Même au fort du déduit parfois, vois-tu, l'amante
Doit avoir l'abandon paisible de la sœur.

Sois langoureuse, fais ta caresse endormante,
Bien égaux tes soupirs et ton regard berceur.
Va, l'étreinte jalouse et le spasme obsesseur
Ne valent pas un long baiser, même qui mente !

Mais dans ton cher cœur d'or, me dis-tu, mon enfant,
La fauve passion va sonnant l'olifant !...
Laisse-la trompetter à son aise, la gueuse !

Mets ton front sur mon front et ta main dans ma main,
Et fais-moi des serments que tu rompras demain,
Et pleurons jusqu'au jour, ô petite fougueuse !


Lundi 14 juin 2010 à 22:39

 Deux petits poèmes que je me permet de mettre en parallèle. Le premier est de Jacques Prévert, le second de Maurice Carême.

http://son-et-lumiere.cowblog.fr/images/IMG2036.jpg

 

 

 

SABLE MOUVANT 

Démons et merveilles
Vents et marées
Au loin déjà la mer s'est retirée
Et toi
Comme une algue doucement caressée par le vent
Dans les sables du lit tu remues en rêvant
Démons et merveilles
Vents et marées
Au loin déjà la mer s'est retirée
Mais dans tes yeux entr'ouverts
Deux petites vagues sont restées
Démons et merveilles
Vents et marées
Deux petites vagues pour me noyer.


LE CHAT ET LE SOLEIL

 

Le chat ouvrit les yeux
Le soleil y entra.
Le chat ferma les yeux
Le soleil y resta.

Voilà pourquoi le soir,
Quand le chat se réveille
J'aperçois dans le noir
Deux morceaux de soleil.

Mercredi 26 mai 2010 à 0:00

 


Car la journée fut forte en émotions, et que je vais aller me coucher...
De la douceur.
 
Et une sensation de bien être : Au cabaret vert.

Depuis huit jours, j'avais déchiré mes bottines
Aux cailloux des chemins. J'entrais à Charleroi.
- Au Cabaret-Vert : je demandai des tartines
Du beurre et du jambon qui fût à moitié froid.

Bienheureux, j'allongeai les jambes sous la table
Verte : je contemplai les sujets très naïfs
De la tapisserie. - Et ce fut adorable,
Quand la fille aux tétons énormes, aux yeux vifs,

- Celle-là, ce n'est pas un baiser qui l'épeure ! -
Rieuse, m'apporta des tartines de beurre,
Du jambon tiède, dans un plat colorié,

Du jambon rose et blanc parfumé d'une gousse
D'ail, - et m'emplit la chope immense, avec sa mousse
Que dorait un rayon de soleil arriéré.

Arthur Rimbaud - 1870 (à peu près, je ne sais plus exactement)


 
 

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